« Ils sont là, partout, à flotter dans les airs tout autour de nous sans même que l'on puisse les voir. Ils ont le pouvoir d'amener la paix en tant de guerre, l'amour quand la haine devient trop forte, l'amitié quand la solitude nous emporte, l'empathie lorsque notre égo devient trop sur-dimensionné, la tristesse quand notre bonheur dépasse les frontières autorisées. Nous ne pouvons en aucun cas les contrôler, ils vont et viennent comme bon leur semble, et sont volatils; à peine pensons-nous les maitriser qu'ils nous échappent des mains et vont vers notre voisin. Oui, c'est bien des sentiments que je parle. Vous savez, ce dont vous vous moquez la plupart du temps ? Car oui, personne ne fait vraiment attention à eux, ils sont tellement incroyables ! Et pourtant, leur accorder ne serait-ce qu'une petite place dans notre esprit les rendrait encore plus forts, plus intenses... Vous devez vous demander « Pourquoi cette personne parle-t-elle tant de nos vulgaires sentiments ? Ils sont là point-barre, il n'y a aucunement matière à épiloguer là-dessus ». Et bien, si je me permets d'aborder ce sujet, c'est peut-être car j'ai une bonne raison. Vous savez, quand vous mourrez, vous prenez conscience de la vie que vous aviez, si dépourvue de sens fut-elle. Vous vous remémorez un par un tous vos souvenirs, votre premier amour, votre premier boulot, votre première dispute avec votre moitié, votre première erreur, votre première maladie … Et puis vous revenez à la réalité : vous êtes mort et rien ne pourra plus jamais changer. Si vous aviez fait des erreurs, il n'est plus possible de les réparer. Si vous aviez des choses à dire, il vous sera maintenant impossible d'ouvrir la bouche pour le faire. Oui, le monde est cruel, à peine est-on né que la mort sonne à notre porte. C'est pour cela que l'on ma envoyé, pour vous faire prendre conscience à tous et à toutes que la vie, ce n'est pas rien. Alors parlez, chantez, jouez, criez, lisez, dansez, profitez … VIVEZ ! »

Quelle ne fut pas la surprise des habitants de Sofia lorsqu'ils reçurent cette lettre, passée avec soin sous leur porte d'entrée ! Cela ressemblait plus à une secte qu'autre chose, ou bien était-ce un canular ? Qui serait assez fou pour se faire croire envoyé du Ciel afin de prévenir les vivants qu'une fois morts ils ne pourraient plus faire demi-tour ? Qui oserait s'imposer d'une telle manière dans la vie des gens ? Les jours passèrent, et chacun méditait ce qu'il avait lu en continuant de se demander qui diable pouvait être l'auteur de cette fameuse lettre.

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Cela faisait maintenant un an que le message était passé, et il avait porté ses fruits ! Tout le monde profitait dorénavant des plaisirs de la vie, aussi futiles soient-ils; les mentalités avaient changé et les gens ne se voyaient plus comme avant … On aurait dit qu'un bonheur sans faille régnait sur la ville, et on croyait que la paix en resterait à jamais maîtresse. Malheureusement, cela n'était pas le cas des étrangers qui venaient d'emménager, ou bien qui venaient à Sofia en vacances. Ils étaient l'incarnation même des personnes qui n'en ont que faire de vivre et qui se plaignent de tout. Cela horrifiait alors les habitants qui avaient changé grâce à la lettre anonyme, que l'on appelait dorénavant les « Phœnix » (étant en quelque sorte nés une nouvelle fois, avec une nouvelle vision de la vie). Les récents habitants, eux, avaient hérités du surnom « Dragons » (leurs actes contre la vie étant autant de boules de feux soufflées par cet animal fantastique).

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Aujourd'hui, nous pouvons assister aux hostilités entre les deux camps, j'ai nommé les Phœnix et les Dragons. D'une part il y a ceux qui croient au bonheur total et ne demandent qu'à vivre pleinement leur vie, sans jamais se plaindre ou perdre du temps; de l'autre se trouvent ceux qui veulent rétablir la vérité et qui ne se gênent pas pour dire haut et fort que la vie vaut ce qu'elle vaut, c'est à dire pas grand chose. Qui gagnera ce combat et arrivera à vivre comme il le souhaite ? Y aura-t-il seulement un camp gagnant ? Car plus un jour ne se passe sans qu'un fait divers en rapport avec cette lutte n'apparaisse en première page : un « Phœnix » qui ne voulait rien entendre frappé par deux ennemis, un « Dragon » recevant des lettres l'incitant à la paix … La vie n'est plus ce qu'elle était à Sofia ! Alors, choisissez votre camp, et choisissez le bien ! Car une fois ce choix fait, vous ne pourrez pas revenir en arrière … Bienvenue sur le front de guerre !